EGLISE DE ST SYLVAIN

 
Historique de Saint Sylvain



Vers la fin du Xe siècle, Boson le Vieux, comte de la Marche, et, par son mariage, comte du Périgord, fonde un prieuré de religieuses dans la paroisse de St Sylvain, sur la rive gauche de la Dordogne, en aval de Bergerac, où, du chef de son épouse il possède de grands domaines.

L’existence de ce prieuré est attestée dans plusieurs chartes de Saintes, en particulier, par les chartes 140, 21 et 192.
Toutefois, le premier prieuré n’appartient pas à l’abbaye de Saintes, qui alors, n’était pas encore fondée.

Les petits-fils de Boson le Vieux décident d’offrir l’église de St Sylvain et le prieuré à l’abbaye royale de Saintes dont l’église a été consacrée en 1047.
L’arrivée des Bénédictines à St Sylvain ne peut-être comprise qu’entre 1067 et décembre 1072.
Après la mort de Boson III, Aldebert installe «par la force», à Lamonzie, un fondé de pouvoir qu’il appelle son «vicaire». Malgré les engagements pris, il le charge de percevoir des droits et des cens, au détriment du prieuré, qui font ainsi retour à la bourse du comte. En rétribution de ses services, Aldebert II lui accorde une terre, le rapport d’un passage de rivière à Lamonzie, un moulin au port de Prigonrieux et autres avantages retirés aux religieuses.
Attesté comme seul comte à partir de 1073, Hélie IV, fils aîné de Aldebert II, va commettre une faute beaucoup plus grave que son père.
En 1077, il viole ouvertement les promesses de ses prédécesseurs et conclut un pacte avec les moines du prieuré de Paunat. «Donation à Paunat par Hélie, Comte du Périgord, de l’église de Sainte Marie et de Saint Sylvain, qui est située… au dessus du fleuve Dordogne et tout ce qui lui appartient et qui se trouve en son pouvoir…
Vers 1086, l’évêque de Périgueux, Renaud de Thiviers, remet à Sainte Marie et à Saint Sylvain l’église de Coutures, sur le conseil d’Etienne de Labrea, archiprêtre dont dépend cette église.
Ce don a été concédé et confirmé par Drogo de Puy-Aguy, Entregot et second de Gardonne, selon la charte 180.
Par la suite, Second de Gardonne offrira encore une terre à Saint Victor (la Force) don enregistré par la charte 161.
Hélie IV meurt en 1104 et le pouvoir comtal passe conjointement à son frère Aldebert III et à son fils aîné Guillaume Talairand.
Si, jusqu’en 1115, Aldebert III est plusieurs fois témoin de dons importants faits à Saint Sylvain, et si aucune charte ne met en cause son loyalisme envers le prieuré, il n’en est pas de même pour Guillaume Talairand.
Au cours des années écoulées depuis 1089-1081, Saint Sylvain a connu une grande prospérité, qui excite des convoitises. Les moines de Paunat, en particulier, gardent la nostalgie de cette terre d’abondance.
Leurs regrets poussent l’abbé de Saint Martial à intriguer auprès du comte, qui finit par céder à ses perfides conseils et à ses promesses. Très peu de temps après la mort d’Aldebert III, vers 1116, Guillaume de Talairand se parjure et renouvelle le geste coupable de son père en 1077.
L’évêque de Périgueux, saisi d’une plainte de l’abbesse de Saintes, fait le récit de ce forfait dans la charte 22. «Par son inspiration diabolique, il vend la susdite église de saint Sylvain aux moines de Saint Martial de Limoges, pour la somme de 1000 sols ; et plus, par surcroît de malice, ayant pénétré à main armée dans l’église, en chasse avec violence les servantes du Christ, et les contraint à se rendre à pied à Saintes».
La sentence est enfin rendue le 14 juin 1113. L’évêque «adjuge à l’abbesse Sibylle l’église et le domaine de Saint Sylvain, bien restitués, qui avaient été injustement accordés par Guillaume, comte, aux moines de Limoges, et dont ceux-ci s’étaient emparés par la violence». Quant aux moines, installés à Saint Sylvain depuis une quinzaine d’années, conscients du mauvais pas où ils se trouvaient engagés, «après avoir fait argent de toutes les provisions de l’église, et mis en gage ce qu’ils ne pouvaient vendre, ils se sont enfuis nuitamment, laissant maison et église dépourvus de tout. L’évêque reconduit lui-même les Bénédictines à Saint Sylvain. Là, le fils du coupable, Hélie Talairand, et sa femme Philippa, en vertu de la sentence de l’évêque,» prononcent l’expulsion des moines, rendent l’église et le prieuré à l’abbesse et augmentent les dons accordés par leurs prédécesseurs». Ils remettent l’église «aux mains de dame Agnès, religieuse».
Cependant, bien des difficultés restent à résoudre à Saint Sylvain. Que de transactions faites par les moines que les Bénédictines doivent s’efforcer de faire annuler. Dans certains cas c’est impossible. Le 23 juillet 1148, l’abbé de Saint Martial accepte de transiger. L’abbesse garde Saint Sylvain ; mais chaque année, à la fête de l’Assomption, la prieure devra remettre une demi-livre d’argent au prieur de Montandra, dépendant de Saint Martial. (Charte 24).
A partir de ce moment, les documents deviennent extrêmement rares, voire inexistants, à une époque où tant d’événements vont bouleverser le Bergeracois. La vallée de la Dordogne sert de champ de bataille. Français et Anglais, tantôt vainqueurs, tantôt vaincus, ravagent la contrée jusqu’en 1226, où les troupes d’Henri III d’Angleterre prennent Bergerac et forcent son seigneur, Hélie Rudel le Vieux à rendre hommage à leur roi.
Qu’en est-il de Saint Sylvain, juste au bord de la rivière et tout proche de la route qui traverse la plaine?
Ni l’église ni le prieuré ne sont pourvus de défense. Et si, par miracle, ils ont été épargnés, la guerre recommence en 1254.
Vers 1320 Saint Sylvain ne compte plus que deux religieuses. A la mort de la prieure, la dernière bénédictine part chercher refuge à Saintes. Les bâtiments, abandonnés et probablement en partie ruinés, achèvent de tomber. Ils ne seront jamais relevés. L’église seule a été réparée au XIVe siècle, ou même probablement entièrement reconstruite ; les archéologues datent, en effet, de cette époque les parties les plus anciennes, le clocher, en particulier, de l’édifice actuellement existant.
Un peu plus tard, les précautions prises par le pape pour garantir le temporel du prieuré se révélant inefficaces à cause de l’éloignement entre Saint Sylvain et l’abbaye, ces biens sont unis à ceux du clergé de Sarlat.

Source : Société Historique et Archéologique du Périgord
Tome 103